Et si le rachat d’Ubisoft par Vivendi n’était que justice ?

Le rachat d'Ubisoft par Vivendi se fait sentir jour après jour. On vous explique en quoi cela est un juste retour des choses.

Il y a moins de vingt-quatre heures, Vivendi a pris le contrôle intégral de Gameloft, entreprise de développement et d’édition de jeux vidéo téléchargeables fondée par Michel et Yves Guillemot, les frères fondateurs d’Ubisoft. On sait déjà que le premier a démissionné sur-le-champ, quant au conseil d’administration de Gameloft, il a décidé de prendre la poudre d’escampette. C’est désormais Ubisoft qui est dans le radar de Vincent Bolloré, patron de Vivendi. L’homme qui est également président du groupe Canal + possède 20% du capital de la société qui a lancé des jeux tels que Rayman, Assassin’s Creed ou encore Far Cry. Mais à l’heure où Ubisoft est vraisemblablement en grand danger, nons nous demandons si un rachat ne serait finalement pas un juste retour des choses.

S’en tenir à Gameloft serait une erreur

Détenteur d’à peu près 20% des voix d’Ubisoft, le groupe Vivendi ne peut pas totalement influer sur les décisions prises par l’éditeur. Mais même si son PDG, Vincent Bolloré, a toujours affirmé ne pas vouloir prendre le contrôle d’Ubisoft, nous savons que l’homme d’affaires sait sauter sur les bonnes occasions lorsqu’elles se présentent. Désormais maison-mère de Gameloft, Vivendi va poursuivre ses achats, c’est une certitude. Ce serait de la pure folie de la part d’Ubisoft de ne pas croire en cette menace.

Il faut dire que la situation d’Ubisoft est clairement propice à un rachat : l’exercice fiscal 2015-2016 fut florissant pour la société française, qui a engrangé pas moins de 1,349 milliard d’euros pour un bénéfice net en hausse de 14%, à 93,4 millions d’euros, des chiffres qui donnent littéralement le vertige. Les finances d’Ubisoft sont on ne peut plus stables et un acheteur potentiel aurait tort de ne pas vouloir capitaliser sur la gamme étendue de titres AAA de la firme, qui n’hésite pas non plus à innover par le biais de nouvelles licences telles que Steep ou encore For Honor.

Un juste retour de bâton pour Ubisoft

Démission Alexandre de Rochefort après rachat de Vivendi
Alexandre de Rochefort, directeur financier de Gameloft, a démissionné ce jour.

Les offres publiques d’achat de Vivendi deviennent de plus en plus agressives et nous parions qu’Ubisoft ne pourra pas céder bien longtemps. Mais en quoi la prise de contrôle à venir est-elle logique, en quoi suivra-t-elle le cours naturel des choses ? Eh bien tout simplement parce qu’Ubisoft a « vendu son âme au diable », s’est délibérément transformé en un partisan avéré du libéralisme sous toutes ses formes. D’ailleurs, toute entreprise cotée en bourse est un jour ou l’autre exposée à des tentatives de synergie ou de rachat total. Ubisoft souffre logiquement de son succès : le géant au pied d’argile attire les convoitises de colosses encore plus puissants. Telle est la rude loi du marché.

L’une des autres raisons qui expliquent le futur sort d’Ubisoft, c’est également l’orientation qu’a pris le groupe des frères Guillemot au fil des années : à l’image d’Electronic Arts et d’Activision, l’éditeur français s’est contenté de ressortir chaque année son panel de franchises recyclées, des jeux sans saveur se vendant en kit, sans oublier son inévitable formule de DLC en veux-tu en voilà. Qu’est donc devenue l’entreprise de jeux vidéo prometteuse qui avait bénéficié d’aides de l’État au titre de l’exception culturelle française ? Elle a pris la décision d’externaliser toutes ces aides – notre argent, l’argent du contribuable –, et de délocaliser son plus gros studio à Montréal, au Québec. Le Canada a toujours été un moyen pour Ubisoft de s’enrichir et de concentrer ses capitaux en quête de marges toujours plus conséquentes. Ubisoft n’est pas la seule firme à l’avoir fait, mais on regrettera que chacun de ses choix aient été réalisés au détriment de la qualité de ses jeux. Beaucoup n’ont pas digéré le downgrade graphique de Watch_Dogs ou la fadeur des derniers Assassin’s Creed. Mais les dérives d’Ubisoft dépassent probablement le simple cadre du jeu vidéo. Vincent Bolloré et ses proches actionnaires sauront-ils nous apporter le semblant de nouveauté attendu ? On ne demande qu’à voir !

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5 Responses

  1. Très bonne analyse de la situation.
    En revanche au delà des dérives d’Ubi, perso je ne demande pas à voir ce changement de preneur de décisions…

    A chaque E3 c’est plus ou moins la même rengaine avec des annonces folles finissant en désillusion, mais je donnerai toutefois le bénéfice du doute 1 ou 2 exercices de plus aux actuels gérants d’Ubi avant de souhaiter ce passage de flambeau

  2. Etant gamer et professionnel du milieu, je pense au contraire que l’arrivée de Vivendi est un grand danger. Comme tout grand groupe, Ubisoft a besoin de la bourse pour grandir. Ubisoft c’est en effet une entreprise qui doit faire du C.A, mais elle reste la plus créative dans son milieu. Il suffit de voir les 4 derniers E3 pour voir qu’elle continue de sortir des nouveautés (et d’autres en réserves).

    Pour Assassin’s Creed (1 par an), elle n’a fait que répondre à la demande, chaque nouvel opus se vendait mieux que le précédent (même si la qualité s’est dégradé et les mécanismes de jeu ne se sont pas renouvelés). Rien n’oblige les joueurs à acheter le jeu tous les ans… Et Ubisoft n’a pas oublié ses anciennes licences (POP, rayman, BGE), elle les sortira quand elle jugera que c’est le moment.

    Quand à la délocalisation de son studio à Montréal c’est faux ! Ubisoft à créer le studio en 1997 parce qu’en France il n’y avait pas ou pratiquement pas d’aides pour le jeux-vidéos, et c’est encore le cas aujourd’hui ! Le Québec est l’eldorado de la 3D depuis des années par ses aides. La France n’avait qu’à faire pareil surtout que la plupart des écoles françaises sont très connues pour leur formation en animation, jeux-vidéos… La France n’a aucune considération pour les jeux-vidéos, pour exemple: en 2010, Pôle-emploi n’avait toujours pas de catégorie pour les infographistes, ils étaient classés comme informaticien…

    Quand au downgrade (graphique ou gameplay), cela a toujours existé c’est juste que le joueurs ne s’en aperçoivent que maintenant. Les présentations à l’E3 sont la pour faire rêver, donner un but (comme les pubs de voitures); la réalité en est tout autre.
    Ubisoft n’est pas le seul: the witcher 3, Dark Souls 2, MGS 4, Forza, Aliens CM, Killzone 2, Bioshock Infinite (un jeu superbe, mais aussi un raté total si on le compare au vidéos de gameplay vu aux E3).

    Sans parler de la promesse tous les ans de 60FPS pour les jeux consoles tenue par tous les éditeurs, jamais respectée.

  3. Très bonne analyse. Je suis d’accord avec ce que tu dis et mes VDD ont eux aussi raison. Moi je trouve que c’est vrai qu’Ubi se démarque des autres en termes d’originalité, dans la mesure où ils essaient de sortir de nouvelles licences tandis que d’autres boîtes se reposent sur leurs lauriers. Par exemple, même si aujourd’hui les serveurs se vident de plus en plus on a eu droit à The Division. Le vrai souci je trouve c’est que les jeux d’Ubi sont trop « casual », on sent qu’ils veulent toucher un public très large et qu’ils veulent faire de leurs jeux des produits bankable avant tout. C’est d’ailleurs pour ça qu’ils sont baclés la plupart du temps. C’est parce que les dévs ont un planning serré à respecter, et à ce niveau-là c’est les actionnaires qui décident. Donc disons qu’Ubi est toujours un développeur de talent le seul hic c’est qu’il y a trop d’argent en jeu. Ubi a grandi trop vite et va se faire plumer, comme tu le dis très bien dans ton article !

    1. Ubisoft vise en effet trop large en public. Leur dernière tentative de viser un public en particulier c’était pour le POP en 2008 en cel-shading, cela n’a pas réussi.
      Le vrai point noir, si je me trompe pas, il y a un groupe de scénaristes/chef de projets qui a un droit de vie et de mort sur toutes les licences développées chez Ubi ; du coup on voit clairement que entre far-cry / Assassin’s creed / watch dogs / the Division (et prochainement wildlands) on retrouve pas mal de points communs (missions secondaires, tours à débloquer, gameplay…), le sujet de chaque licence est original, mais aucune des histoires ne sont abouties, développées.

      1. Tu marques un point, en effet ! Une certaine redondance se fait sentir dans les jeux d’Ubisoft, notamment en matière de scénario, de gameplay, de quêtes annexes etc. J’ignorais qu’il y avait des scénaristes aussi élitistes et influents chez Ubisoft. Merci en tout cas pour tes commentaires sur le blog, nous sommes ravis d’avoir un nouveau lecteur aussi pertinent et cultivé que toi ! ?

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