Unravel. La plupart des grands médias de la profession s’est empressée de passer ce jeu en revue quelques jours avant sa date de sortie officielle. J’ai le regret de leur informer qu’ils n’ont pas saisi le sens premier d’Unravel, qui est un jeu qui doit se savourer avec le temps. Propulsé par le géant Electronic Arts mais développé par le très humble studio suédois Coldwood Interactive, Unravel fait partie de ces jeux indépendants remplis de promesses. Fidèle à sa réputation d’ovni vidéoludique, Unravel a eu le don d’intriguer les plus curieux d’entre nous dès son annonce à l’E3, en juin 2015. Mais c’est bel et bien manette à la main que l’on pourra prendre la pleine mesure de ce jeu de plateforme qui relève de l’art et transcende le jeu vidéo.
L’allégorie du temps qui passe
« C’est le temps qui mûrit l’amour. L’amour grandit et se solidifie dans la patience… ». Cette citation de l’auteure et journaliste québécoise Simone Piuze résume à merveille ce dont il est question dans Unravel : le temps bien souvent sublime les sentiments, mais avec le temps s’en vont également les êtres qui nous sont chers ainsi que tous les moments de joie et de tristesse qu’ils ont procurés dans nos vies. Notre mémoire, nos souvenirs, sont là pour nous aider à maintenir une connexion avec ces personnes qui ont compté dans notre existence. Sortes de réservoirs de bonheur – et parfois de malheur –, nos souvenirs sont les moteurs de nos émotions. Mais sans eux, que serions-nous ?
Dès l’introduction, Unravel nous met face-à-face avec une vieille dame souffrant d’une amère solitude. Un simple regard sur quelques photos encadrées suffit néanmoins à dessiner un sourire sincère sur son visage pétri par le temps. Sorte d’invocation de la destinée, Yarny, un petit personnage composé de laine rouge s’éveille alors, mettant fin à un long silence empreint de nostalgie. Représentation des états d’âme de la mamie au moment présent, Yarny va partir à la recherche de ses plus beaux souvenirs, perdus, envolés, mais jamais bien loin. Plus qu’une simple figurine, Yarny module le baromètre émotionnel du vieux protagoniste. Ces mêmes souvenirs sont matérialisés sous la forme de petits objets éparpillés dans des lieux emblématiques situés à proximité de la maison de la dame âgée. De son plein gré, Yarny s’en va donc les récupérer. Le problème, c’est que ce monde est bien trop vaste pour lui et que de nombreux obstacles attendent d’être franchis.
Petit Yarny, ce grand héros
Effectivement, le petit bonhomme rouge se lance dans une incroyable quête. Mais afin de mettre la main sur les fragments de mémoire si chers à sa propriétaire, Yarny n’aura d’autre choix que de surmonter les pires difficultés du monde. Il faut dire qu’il n’a pas la constitution d’un super-héros. Sur le plan anatomique, notre compagnon n’est qu’une simple bobine de laine enroulée autour d’une ossature en fer. Il suffit d’une simple chute depuis une branche d’arbre pour que notre ami rende l’âme. Yarny est également incapable de nager. Quelques secondes dans l’eau et il finira pas sombrer sous les flots. Par ailleurs, Yarny n’est pas à l’abri de certains animaux qui pourraient se montrer un brin trop curieux à son égard. Si dans Unravel la majorité des créatures est pacifiste et forme un mélange harmonieux avec une nature superbement reconstituée, quelques bestioles demeureront parfois très farouches. Pour combattre les éléments, Yarny n’aura pour seule arme que son petit cœur. On s’amourachera très vite du personnage, de sa fragilité physique évidente mais aussi de sa volonté sans faille qui lui permet de soulever des montagnes.
Opération démêlage de laine
S’il est vrai que le petit être n’a pas de pouvoir spécial, il est cependant capable de se servir de la laine qui lui sert de vêtement pour créer des cordes, faire des nœuds et jouer du lasso, autant d’actions qui lui permettent d’atteindre des zones normalement hors de la portée de n’importe quel personnage de sa taille. À la manière d’autres héros de jeux de plateforme, Yarny possède une véritable agilité mais l’essence du jeu consiste justement à exploiter ses capacités de tissage dans le but de l’aider à passer les niveaux. Yarny peut donc se transformer en véritable acrobate mais il faudra bien veiller à optimiser le fil de sa laine, cette dernière n’étant pas extensible à l’infini. En effet, la laine de notre héros est reliée à la maison du début, point de départ de l’aventure. Afin d’avancer dans la trame, il devient impératif de trouver une recharge de cette même laine via des points de sauvegarde disséminés dans certains endroit cruciaux. Une fois une bobine découverte, Yarny peut poursuivre son avancée !
On notera qu’Unravel n’est pas un simple jeu d’aventure ou de plateforme. Chaque chapitre est ponctué par différents puzzles qu’il est nécessaire de résoudre pour aider notre petit bout de laine sur pattes à progresser dans l’histoire. S’il sera une nouvelle fois question d’utiliser les capacités de Yarny à bon escient, ces phases de réflexion exigeront de vous que vous déplaciez des objets du décor, interagissiez avec des éléments environnants et bien plus. La difficulté de ces énigmes est loin d’être corsée. Le plaisir de découvrir l’incroyable univers d’Unravel restera intact de bout en bout pour les moins ambitieux d’entre vous, les autres, par contre, pourraient être offusqués par le manque de challenge proposé.
Beau à vous en exploser la rétine
En effet, Unravel est un jeu de toute beauté. Tout semble avoir été peaufiné dans les moindres détails. Durant nos parties, nous n’avons dénoté aucun clipping, aucune saute d’images ou rupture dans l’affichage. Et encore moins d’aliasing ! Les graphismes sont lisses, les animations on ne peut plus fluides et la 3D isométrique parfaitement optimisée. Vraiment, le rendu est parfait et les développeurs, en plus de proposer un sans-faute sur le plan technique, ont réussi à transcrire une ambiance poétique comme on en aura rarement vu dans le monde du jeu vidéo. Il faut dire qu’Unravel, plus qu’un jeu, est un véritable produit artistique. Les images sont très photographiques ; l’utilisation d’une focale grand-angle offre une perception différente des objets ainsi que de très beaux flous d’arrière-plan. Le choix des couleurs est lui aussi très pertinent et on ressent clairement l’influence des saisons au fur et à mesure des différents chapitres. Enfin, les bruitages et effets sonores viennent embellir l’œuvre finale. Jamais la chute d’une feuille ou le passage éclair d’un hérisson derrière des buissons ne vous auront semblé si réalistes par exemple !
La bande-son des grands jeux
Unravel est un jeu poétique, un titre tantôt mélancolique, tantôt lyrique. Aussi, nous devions logiquement nous attendre à une bande-son capable de nous transporter, de nous faire rêver, de nous faire oublier notre présent de pauvres petits mortels. Cela, la musique d’Unravel le fait encore une fois à merveille. La BO est touchante et la redondance de certaines pistes renforce l’aspect nostalgique du jeu, sans toutefois tomber dans l’excès. On appréciera donc la musicalité d’Unravel, qui transcende l’ensemble de l’expérience et en renforce le contenu, à n’en pas douter.
Unravel est une vraie pépite. Le titre du studio Coldwood Interactive fera incontestablement partie des jeux de l’année et est à l’image de ses créateurs : sincère, touchant et rigoureux. En effet, si Unravel n’excelle pas vraiment en tant que jeu de plateforme ou de réflexion, sa direction artistique irréprochable, ses énormes qualités en matière de game design et son expérience qui transcende et bouleverse les émotions en font une perle rare. Même si Unravel n’est pas exempt de défauts – la durée de vie du jeu n’est pas des plus importantes et la difficulté des énigmes à résoudre est quasi-nulle –, cela serait injuste, voire même cruel que de ne pas se montrer élogieux à son égard. En effet, Unravel, c’est une bouffée de fraîcheur et de délicatesse, et, surtout, un jeu qui inspire l’admiration et le respect. Les plus et les moins ✔︎ Le personnage de Yarny, touchant et attachant. ✘ Des énigmes peut-être trop simples...La note de la rédaction
✔︎ Techniquement et artistiquement impeccable !
✔︎ Une bande-son tout simplement somptueuse.
✔︎ Une prise en main on ne peut plus simple.
✔︎ Une bonne rejouabilité grâce aux collectibles.
6 Responses
Ca fait plaisir de voir que tous les joueurs ne sont pas de gros blasés et qu’il y en a encore qui peuvent saluer la poésie et l’émotion d’un jeu plutôt que le descendre sur son absence de difficulté comme certains « journalistes ».
Excellent test !
Merci Grim, je ressens exactement la même chose que toi ! On est d’accord, Unravel n’est pas qu’un simple jeu, c’est bien plus que ça. @ bientôt l’ami !
Ah le voilà 🙂 Je l’attendais avec impatience! Merci pour ce test, c’est très bien rédigé, ça donne envie de découvrir le jeu et je pense que la note est méritée!
Unravel,rien qu’en vidéo, on le voyait venir de loin, tout de suite on voyait que ça allait être une pépite.
c’est là qu’on voit que certaines personnes ont plus de talent et de savoir-faire que d’autres.