Aujourd’hui, c’est la guerre en Ukraine, et il s’avère qu’il se passe des choses du côté des jeux vidéo. Comme je vous l’avais déjà expliqué dans un article précédent, en plus de ses revers capitalistes, le jeu vidéo pourrait être décrit comme un « média guerrier » dans le sens où il est né sur des machines dédiées à la guerre.
Ainsi, William Higinbotham, physicien, utilise un ordinateur dont l’objectif était de simuler des trajectoires balistiques pour créer Tennis for Two en 1958. Ces machines étant principalement utilisées par l’armée, il ne faudra pas longtemps pour que l’on invente le premier jeu de guerre : Spacewar, en 1961. C’est ensuite une longue histoire d’amour qui s’est déroulée entre l’armée et les jeux vidéo, comme en témoigna Marine Doom, un « mod » développé par deux militaires américains pour transformer Doom en une simulation militaire pour l’armée américaine.
D’ailleurs, ce lien entre jeu vidéo et milieu militaire a perduré jusqu’à nos jours. En effet, certaines franchises comme Call of Duty ont des accords avec des fabricants d’armes afin de pouvoir les représenter dans leurs jeux. S’ensuivent des versements de royalties en vertu des droits de propriété intellectuelle. Donc acheter un Call of Duty, c’est malheureusement financer le commerce d’armes. Si ce type de partenariats ne se fait pas trop voir et reste dans l’ombre, d’autres agendas ne se cachent pas tant que ça.
Le jeu America’s Army a été depuis le début un instrument de recrutement pour l’armée américaine, le site du jeu étant un portail vers des possibilités d’enrôlement. Depuis sa publication en 2002, il aurait touché 20 millions de joueurs, et fermera bientôt ses serveurs, d’ici mai 2022. Le jeu avait été développé dans le but d’améliorer l’image de l’armée américaine et le recrutement des jeunes gens par ce biais. Tout dans le jeu était fait pour mettre les joueurs dans la peau de l’armée U.S. puisque peu importe l’équipe dans laquelle vous jouiez, les opposants prenaient la forme de forces ennemies ; on incarnait toujours les gentils. Bref, un bel instrument de manipulation et de propagande.
Guerre en Ukraine et jeux vidéo
Vous le savez, on l’a toutes et tous vu passer, c’est la guerre en Ukraine. Mais quel est le rapport avec les jeux vidéo, allez-vous me demander ? Eh bien, premièrement, nous avons vu que le jeu vidéo et la guerre sont intimement liés depuis la création du média. Deuxièmement, parce qu’il se passe des choses dans le monde des jeux vidéo.
Le jeu vidéo est un média, et comme tout média, il est constitué de langages qui véhiculent du sens, des idéologies, etc. Dans la crise actuelle, on peut voir plusieurs choses assez intéressantes. Premièrement, des images du conflit armé circulent, notamment sur TikTok, et lorsque l’on se penche sur les commentaires, on voit de nombreuses références à Call of Duty: Warzone, au Goulag, etc. Face à de tels commentaires, on peut avoir plusieurs réactions. Premièrement, on peut s’indigner. En effet, des comparaisons entre un jeu vidéo et la mort de vraies personnes peuvent être considérées comme peu respectueuses.
Cependant, on peut également les considérer autrement, à la lumière de théories comme celle d’Ignacio Ramonet dans le livre Les propagandes silencieuses. La pop culture se fait généralement le reflet des inquiétudes actuelles. La littérature, le cinéma ou n’importe quel média peut faire office d’exutoire. Ainsi les blagues et références à COD: Warzone pourraient-elles être considérées comme telles, un peu à la manière des comédies d’après-guerre comme La Grande Vadrouille, pour ne citer que ce film. Les médias permettent de se réapproprier des évènements effrayants tels que les guerres. Le joueur, le spectateur ou même le créateur s’arrogent une forme d’agentivité, tandis que les blagues permettent de dédramatiser un évènement sur lequel nous n’avons aucun contrôle.
Le souci des films ou des jeux vidéo est que, parfois, comme dans le cas de COD, America’s Army ou d’autres franchises, la violence est sublimée et glorifiée à dessein, les conflits armés sont vus comme des occasions de se démarquer en tant qu’homme. Entre réappropriation, manipulation et manque de respect, il est difficile de trancher.
Hyper réalisme et récit populaire
Dans la crise actuelle, le média vidéoludique s’est démarqué d’une autre manière. En effet, comme souvent avec les médias sociaux actuels, de nombreux récits se construisent et des pléthores d’images circulent. L’armée ukrainienne a annoncé la destruction de cinq avions et d’un hélicoptère russe. De nombreuses images d’un avion de chasse au-dessus de Kiev ont inondé la toile et c’est ainsi que la légende urbaine du « fantôme de Kiev » s’est construite : un pilote aurait abattu tous ces appareils à lui seul, et il donne du fil à retordre aux forces russes. Cependant, si on se penche sur le communiqué de l’armée ukrainienne, il n’y a aucune mention d’un avion solitaire.
En outre, les images du fameux fantôme de Kiev qui circulent sur les réseaux sociaux proviennent en réalité du jeu DCS World, un simulateur de vol. La société, de manière générale, s’était déjà inquiétée de l’hyper-réalisme dans les jeux vidéo et de leurs effets sur les joueurs. Cependant, l’utilisation d’images de jeux vidéo hyper réalistes à des fins de manipulation et de mise en circulation de fake news semble nous prendre au dépourvu.
Dans un climat de crise, tout le monde peut tirer son épingle du jeu en profitant de la situation. Ainsi, de nombreuses images de conflits passés circulent et sont présentées comme actuelles, des gens organisent des lives sur TikTok en se faisant passer pour des sinistrés ukrainiens et réclament de l’argent. Ils passent en live, mettent un son d’alarme à la bombe en fond, et le tour est joué, des viewers les prennent en pitié et effectuent des dons. Il est difficile de s’y retrouver sur les réseaux sociaux actuellement, il est plus que jamais nécessaire de vérifier les sources (en étant conscient des biais des uns et des autres) avant de tirer des conclusions hâtives !
Le média vidéoludique : plus que du divertissement
Vous le savez, je suis un fervent défenseur du jeu vidéo en tant que média culturel et artistique. L’enjeu de ma thèse est notamment de remettre cette culture au centre de l’objet et d’éloigner le jeu vidéo des velléités commerciales qui dissimulent tout message plus profond, qu’il soit culturel ou artistique. Parfois, il est bon d’ôter le voile de divertissement pour s’intéresser à ce qui fait la beauté du jeu vidéo. Quant à la crise politique d’aujourd’hui, aussi catastrophique soit-elle, celle-ci permet de voir poindre l’humain au milieu du chaos.
Certains jeux naissent d’envie de partager des expériences, de véhiculer un message particulier, de conscientiser la population sur certains thèmes. C’est le cas de This War of Mine, un jeu anti-guerre qui, loin de mettre la violence à l’honneur en la rendant plaisante, plonge le joueur dans la peau de sinistrés tentant de survivre. Dernièrement, 11 bit studios, basé en Pologne, s’est exprimé sur le sujet de la guerre en Ukraine, et a choisi de faire don des profits générés par le jeu à la Croix-Rouge ukrainienne.
11 bit studios team statement:#FuckTheWar#Ukraine @RedCrossUkraine @Ukraine pic.twitter.com/bVqBlZnR8j
— 11 bit studios (@11bitstudios) February 24, 2022
Même dans les moments les plus sombres, et dans les endroits les plus inattendus, on trouve de l’humain. Bien que la situation soit horrible et déprimante, ce genre d’initiatives réchauffe le cœur. J’aimerais terminer cet article par une citation de Paul Valéry, qui résonne avec ce que je pense de l’idiotie de la guerre : « La guerre, c’est le massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent et ne se massacrent pas. »
6 Responses
Et oui internet et les fake news, le pilote qui a descendu plusieurs avions, c’est la tête de quelqu’un d’autre qu’on a collé sur la photo je crois. Et pour le jeu vidéo, les photos réalistes c’est Arma 3 sur pc.
Tout ce que j’en retire, c’est qu’on sait depuis des années où est la gangraine mais on ne fait rien pour la couper. Je parle de Poutine, on sait qu’il fait les lois pour lui, il est toujours auto-élu et tout le monde trouve ça normale ? Et les russes s’ils ne sont pas encore au courant qu’ils vivent dans une dictature dorée, c’est vraiment que leur Q.I est plus bas que terre, tout comme les chinois.
Je ne comprendrai jamais , comme dans tous les pays , alors que les gens sont des millions avoir peur, d’une ou de quelques personnes minoritaires, alors qu’on peut les écraser d’un revers de la main…..
De toute façon poutine est un homme mort, parce que franchement si après le génocide, crime de guerre et cie, on le laisse libre, c’est qu’on aime ça.
Je ne comprends pas qu’il ne soit pas déjà mort, lui et ses généraux. On doit quand même savoir où sont localisées les 12 fusées nuclaires, si pas chercher sous l’eau.
On sait où Poutine réside qu’on le bombarde, des équipes d’homme surentrainé, ça doit exister logiquement, ils attendent quoi.
L’armée russe, ce n’est pas ce qui se fait de plus fort, hormis les sous-marins, ils vont se faire déglinguer.
Soyons sérieux, aller, après que tout ça serait fini ou soit fini, Poutine y va faire quoi, rester comme ça, à continuer à présidé la russie comme s’il n’y avait rien eu. Je ne sais pas mais le mec y pense comme ça, c’est vraiment que la tête ça ne va plus. Il a été se foutre dans une merde dont il est perdant, il gagnera strictement rien du tout, le seul truc, c’est qu’on connait l’année de sa mort 2022. Et en un sens quand il sera mort, il va libérer la russie. Poutine il a peur que les russes se soulèvent contre lui, il a de la chance de les avoir bien lobotomisé, sinon son propre peuple le pendrait par les couilles. Mais attention car ils ne le sont pas tous et ça il en a peur. Je ne voudrais jamais vivre comme lui, toujours être en présence de garde du corps 24h sur 24, des gens qui goutent sa nourriture si jamais s’était empoisonné, ce n’est pas une vie, moi je serais lui, je prendrais un flingue et je me la mettrai dans la bouche et j’appuierai, en plus il rendrait service à tous le monde. Si jamais tu me lis poutinou d’amour, n’hésite pas.
Encore une fois c’est facile de s’en prendre à des personnes qui n’ont rien fait et je m’en contrefou s’il balance une ogive nucléaire sur la belgique mais qu’il ne me rate pas, parce que personnellement je ne le raterai pas, je lui ferai avaler la peau de son cul en lamelle
Il y en a marre de tous ses fous, qui nous dirigent, qui nous sucent notre argent. Viva la revolutione et ça vaut pour beaucoup de pays. Que les gens se soulèvent tous ensemble. Ils ne sont rien face à nous
Je suis venu ici juste pour le commentaire conspi du dessus. Barré le gonz’.
sincèrement va te faire foutre
Assez choqué par la réaction de Stephane oO. Mais bon les médias nous manipulent tellement. Tout a été fait pour dire que Poutine est le grand méchant loup… Par contre quand les USA vont faire la guerre au Vietnam, en Irak, au Yemen, en Yougoslavie et j’en passe, tout en violant les traités internationaux ça ne dérange personne…
Ce que je retiens c’est que les jeux vidéo sont utilisés comme des outils de propagande depuis la nuit des temps. Ils représentent un danger pour les personnes naïves, apolitisées à la base (car facilement influençables) et qui se désintéressent de l’histoire.
Ta citation de Paul Valéry résume bien l’injustice, la mascarade et l’hypocrisie de la guerre. Dire que des dirigeants s’appellent 20 minutes comme si de rien n’était pour ensuite tuer des civils… Faire la guerre aujourd’hui c’est faire de la politique.
Pour accompagner le sujet il y a un Bundle for Ukraine sur itchio pour aider l’Ukraine qui a déjà récolté 5 millions. Avec les évents comme AGDC et Z events entre autres, le jeu vidéo peut aussi être vecteur d’aide et d’avancée dans le monde.
https://itch.io/b/1316/bundle-for-ukraine
Je vais répondre à tout le monde dans un commentaire pour reclarifier mon but en écrivant cet article. Mon objectif était triple : 1) informer sur un sujet d’actualité, 2) faire ma part d’éducation aux médias en soulignant les potentielles dérives/manipulations face auxquelles on peut se trouver et 3) souligner qu’il y a de belles initiatives, même dans les temps les plus sombres.
L’espace commentaire est là pour que les lecteurs s’expriment et échangent avec les rédacteurs. J’accueille à bras ouvert de potentiels débats, mais moins les attaques gratuites, insultes ou incitations quelconques à des comportements négatifs, etc.
Dans tous les cas, merci de m’avoir lu, merci pour vos commentaires et pour vos apports =) (je vous concocte quelques sujets sympathiques 😀 )